Remise en jambe post Covid dans les chaînons de l’Armet

Remise en jambe post Covid dans les chaînons de l’Armet

L’histoire commence par un évènement fort, ça ne sera ni Ben ni Victor, nos guides habituels qui encadreront ce weekend, mais un ancien des équipes en passe de devenir guide : Bastien. Entre excitation et appréhension le débat sur le choix de la course est houleux. Jeudi soir la décision est prise : nous allons faire la traversée des chaînons de l’Armet en deux jours avec bivouac sur l’arête. La motivation des troupes est au maximum, sur le papier l’itinéraire est de grande ampleur. L’équipe est constituée de 10 espoirs, Anto et Arthur, deux anciens des équipes et Bastien.

Nous nous retrouvons samedi matin à 6h30 à Lavaldens. Nous organisons la dépose d’une voiture vers Oris-en-Rattier qui est la fin théorique de la course. Nous enchaînons avec un petit temps de présentation, pour cette première course avec Bastien. Il nous précise que nous allons shunter une partie des arêtes, à cause de corniches trop proéminentes sur l’itinéraire. Il est prévu que nous accédions à l’arête par le couloir des skieurs, et que nous bivouaquions au col de la Besse.

La cornemuse sonne, le départ est annoncé, les sacs sont lourds, les mollets galbés, le rythme est soutenu.

Le sentier disparaît rapidement, et nous nous retrouvons à brasser dans des buissons.

Quand nous arrivons, dans la neige, mauvaise surprise elle est blète (Mot très utilisé dans la région de Chamonix pour décrire une neige molle et mouillée, merci Bastien, nous nous coucherons moins con !)

Arrivés au pied du couloir vers 9h30, rapide pause pour mettre les crampons, et nous mettons notre meilleure équipe de stakhanovistes du dénivelé pour tailler les marches dans ce long couloir de neige.

Le couloir est globalement bien rempli de neige quelques passages sont un peu dégarnis mais ils se négocient aisément.

11 h, arrivés sur l’arête, l’omelette du matin est déjà loin, nous pique-niquons là. Les cordés se forment et les encadrants se greffent sur certaines. La progression s’effectue en corde tendue pour une grande majorité de l’arête. Notre objectif du jour, le col de la Besse est à portée de main mais la progression est difficile, dans les passages neigeux nous nous enfonçons jusqu’aux genoux, parfois jusqu’au bassin et dans les passages rocheux nous retrouvons l’agréable sensation de marcher en crampons sur des rochers instables. Les bruits sont stridents, les chevilles mises à rude épreuve et l’odeur nous rappelle la pierre à feu.

Nous mettons quand même presque 3 h pour atteindre le col, nous retrouvons les vestiges d’un bivouac effectué par les derniers hommes à avoir foulé cette arête.

Il est 14h30 nous avons encore du temps devant nous. Après prise de température du moral des troupes, nous choisissons de continuer à avancer pour bivouaquer plus loin. D’après la carte il y a un bon replat après le rocher du lac.

La caravane s’étire…

Il reste quand même de belles corniches que nous prenons soin de contourner très largement au vu de la qualité de la neige.

16h30, nœud décisionnel : le rythme a bien ralenti les troupes sont exténuées, la progression est de plus en plus laborieuse, aucun emplacement de bivouac ne se dessine à l’horizon. Après moults débats et argumentations, la décision est prise de bivouaquer sur un petit sommet avant le rocher du lac, d’après nos spécialistes en BTP en nivelant la neige du sommet, nous arriverons à faire une plateforme assez grande pour faire dormir tout le monde. Finalement nous décidons, nous dormirons là, Bastien déclare gaiement « ça joue le chalet » (expression suisse voulant dire je ne sais pas vraiment quoi, mais disons qu’il valide)

Le bivouac s’organise en peu de temps la fameuse plateforme est réalisée, des mains courantes sont installées et des réchauds crachent leur précieux gaz pour faire fondre la neige. C’est l’effervescence, la scène est à la croisée entre une colonie de vacances au Sappey-en-Chartreuse et un camp de base sur l’arête du K2.

21 h, nous sommes dans les duvets, devant le plus beau film du monde : Le lendemain s’annonce prometteur, la météo parle d’un bon regel en montagne, ce qui nous permettrait de progresser plus rapidement.

Levés avec le soleil à 6 h, conclusion : la frontale ça ne sert à rien au mois de juin !

Tout le monde a un peu près dormi, le départ s’organise.

Ma cordée prend de l’avance pour faire la trace. Après un court rappel je prends pied dans la neige et là, mauvaise surprise, la neige est toujours aussi blète !

Nous tentons de progresser par tous les moyens, mais la montagne ne veut pas de nous, à 9h nous avons parcouru moins de 200 m. Nous décidons de faire demi-tour et trouver un itinéraire de redescente. Aucune contestation n’est entendue, nous sommes tous convaincus que continuer n’a aucun sens.

Après deux heures de progression en sens inverse nous trouvons une langue de neige qui nous permet de descendre vers le lac du Rif Bruyant.

 Nous en profitons pour réviser les techniques de progressions sur pente de neige.

Arrivés au lac à 11 h : pause pique-nique, séchage de matos et baignade.

13h30 : il faut descendre il nous reste tout de même encore 1000m de déniv. à descendre, l’envie de remettre les grosses chaussures mouillées est, disons très faible …

Arrivés à la route à 15 h, nous ne sommes ni au départ ni à l’arrivée de la course, donc il n’y a pas de voiture au parking. Une campagne de stop est lancée, les locaux sont coopératifs 5 voitures suffiront à faire partir 4 personnes dans deux directions différentes.

Débrief au bar de la Morte devant une boisson fraîche et houblonnée.  Les mots prononcés durant cette entrevue resteront confidentiels à jamais, mais la conclusion est que tout le monde sortira beaucoup plus expérimenté de cette expérience.

Un grand merci à Bastien, Arthur et Antonin pour l’encadrement de cette sortie !!

Narré par Vincent Gachet pour les équipes jeunes alpi Isère

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